Prélèvement à la source : principes et procédure
Après plusieurs semaines de tergiversations autour de son application, le prélèvement à la source devient obligatoire pour tous les contribuables et il sera bien mis en œuvre au 1er janvier 2019. L’impôt sera désormais ponctionné directement sur vos revenus, et non plus avec un an de décalage.
Avec l’ancien système encore en vigueur en 2018, les contribuables sont imposés chaque année sur les revenus perçus au cours de l’année précédente. En 2018, les contribuables payent donc l’impôt sur les revenus perçus en 2017.
Avec le prélèvement à la source, le mode de paiement de l’impôt sur le revenu ne repose donc plus sur le système des tiers provisionnels ou sur la mensualisation mais sur un prélèvement opéré directement sur les revenus du contribuable. Il n’y aura plus aucun décalage de paiement : l’impôt sera prélevé en année N au moment où les revenus sont encaissés. Le prélèvement à la source entraîne donc une perte de trésorerie pour le contribuable, puisqu’il n’y a plus de décalage entre le moment où il perçoit ses revenus et le moment où il paye l’impôt correspondant.
Pour vous aider à mieux comprendre les subtilités de cette nouvelle procédure, vous trouverez ci-dessous un certain nombre de questions que nous avons listées pour vous :
Quels revenus sont concernés ?
Tous les revenus sont concernés par le prélèvement à la source. Mais les modalités de collecte varient selon le type de revenus, car tous ne peuvent pas être directement prélevés avant leur versement effectif. On distingue ainsi le système de retenue à la source (RAS) du système d’acomptes (mensuels ou trimestriels) prélevés sur le compte bancaire du contribuable.
- Salaires
- Allocations chômage
- Pensions de retraites.
Le nouveau système reposera donc sur l’intervention d’un tiers payeur chargé de collecter et reverser l’impôt :
- l’employeur si le contribuable est salarié;
- l’administration s’il est fonctionnaire;
- la caisse de retraite s’il est retraité;
- Pôle emploi s’il est demandeur d’emploi.
L’impôt sera directement prélevé sur le salaire, la pension de retraite ou l’allocation chômage avant leur versement mensuel au contribuable.
Si le salarié a plusieurs employeurs ou le retraité plusieurs caisses de retraite, le fisc communique le même taux de prélèvement à la source à chacun d’entre-eux. Le même taux s’appliquera donc aux différents salaires et pensions, quel que soit leur montant respectif.
Quelle est la procédure pour les Professions indépendantes ?
Pour les BIC et les BNC, c’est l’administration fiscale qui prélève l’impôt à la source tous les mois ou tous les trimestres sur le compte bancaire du contribuable. Il en est de même des revenus perçus par les gérants majoritaires de Sarl, les professions libérales ou les agriculteurs.
Quelle est la procédure pour les Revenus fonciers ?
Il est difficile de retenir à la source le montant de l’impôt sur les loyers versés par un locataire. Les revenus fonciers prélevés par les propriétaires-bailleurs sont donc traités selon le même principe que pour les indépendants : le prélèvement est effectué chaque mois ou chaque trimestre sur le compte du contribuable, via un système d’acomptes.
Quelle est la procédure pour les Particuliers employeurs ?
Les salaires versés par les particuliers employeurs sont également concernés par la réforme. Le prélèvement à la source sera alors réalisé via les sites Cesu et Pajemploi, qui permettront de collecter l’impôt à la source sur les rémunérations versées.
Toutefois, en raison d’un délai nécessaire pour adapter les services Cesu et Pajemploi à la réforme, le prélèvement à la source effectué sur les salaires versés par les particuliers employeurs est reporté d’un an : il n’entrera donc en vigueur qu’en 2020. Par conséquent, les salariés des particuliers employeurs ne paieront pas d’impôt en 2019. Leur impôt 2019 n’est pas pour autant annulé : ils devront le payer en 2020, année au cours de laquelle ils devront payer à la fois leur impôt sur les revenus de 2019 et de 2020.
Qu’est ce qui va changer pour l’employeur ?
La mise en place du prélèvement à la source implique de nouvelles formalités pour les entreprises, qui doivent désormais reverser à l’administration fiscale l’impôt dû chaque mois par le contribuable salarié.
Qui va transmettre le taux d’imposition et comment est-il calculé ?
L’employeur devient un collecteur de l’impôt sur le revenu. C’est la DGFiP (et non ses salariés) qui lui transmet, pour chaque salarié, le taux à appliquer sur le salaire net en utilisant les données fournies dans la DSN (déclaration sociale nominative) adressée par l’employeur.
Le prélèvement à la source consiste à faire payer l’impôt au moment où le contribuable perçoit le revenu. Problème : le barème de l’impôt est progressif et, par définition, on ne connait pas le montant annuel des revenus au moment de leur encaissement. Conséquence : le taux de la retenue à la source est calculé à partir de la déclaration des revenus de l’année précédente.
Exemple :
- le contribuable déclare ses revenus de 2017 (année N-1) en mai-juin 2018 (année N)
- le taux de prélèvement lui est communiqué en même temps que son avis d’imposition au cours de l’été 2018 (année N)
- ce taux est appliqué aux revenus perçus à compter de janvier 2019 (année N+1).
Ce taux peut être actualisé en cours d’année lorsque la situation personnelle du salarié évolue : mariage, naissance, baisse de revenus… L’employeur n’est pas informé des motifs du changement de taux. Le salarié qui souhaite contester le taux qui lui est appliqué doit s’adresser aux impôts et non à l’employeur.
Qu’en est-il du bulletin de salaire ?
A compter du 1er janvier 2019, la fiche de paie remise chaque mois au salarié indique l’assiette du prélèvement, le taux appliqué ainsi que le montant du salaire qui aurait été versé au salarié sans prélèvement à la source.
Salaire brut ou salaire net ?
Le prélèvement à la source correspond à l’impôt sur les revenus effectivement perçus par le contribuable. Il s’applique donc sur le salaire net qui devrait normalement lui être versé si l’impôt n’était pas prélevé directement sur ce revenu, après déduction des cotisations sociales sur le salaire brut. Le taux de prélèvement à la source s’applique donc au salaire net et non au salaire brut. On distingue ainsi le salaire net imposable (sur lequel s’applique le prélèvement à la source) du salaire net perçu (celui versé après impôt).
Reversement à la DGFIP
L’employeur doit ensuite reverser le mois d’après à la DGFIP la somme prélevée pour le mois M. Il doit le faire avant les dates limites de reversement du prélèvement à la source fixées par l’administration (qui dépendent de la taille de l’entreprise).
TESE et Urssaf
Les TPE qui emploient moins de 20 salariés ont la possibilité de faire prendre en charge par l’Urssaf les formalités de calcul, de déclaration et de reversement du prélèvement à la source sur les salaires qu’elles versent. Pour ce faire, ces entreprises doivent adhérer à un titre simplifié pour l’embauche de salariés : le TESE.
Acomptes mensuels
Un contribuable qui touchent à la fois un salaire ou une pension de retraite et des revenus accessoires (revenus fonciers, BIC…) subira donc concrètement deux prélèvements à la source :
- le premier, sous forme d’une retenue à la source directement prélevée sur son revenu avant versement sur son compte bancaire ;
- le second, sous forme d’un acompte mensuel prélevé tous les mois (ou, sur option, tous les trimestres) par les impôts sur son compte bancaire.
Déclaration de revenus
Le système du prélèvement à la source ne supprime donc pas la déclaration annuelle des revenus puisque le montant global de l’impôt est toujours calculé à partir de l’ensemble des revenus du foyer et tient compte de la situation de famille, des charges déductibles, des réductions d’impôts, etc. Le contribuable doit par conséquent continuer à fournir ces informations aux services fiscaux chaque année. Il y aura donc bien une déclaration de revenus en 2019. Elle devra être adressée aux impôts au printemps.
Taux du prélèvement ?
Taux du foyer ou taux personnalisé
Le taux du prélèvement à la source est calculé à partir de l’ensemble des revenus du foyer (et non du seul salarié). Il s’agit d’un taux personnalisé qui dépend de la situation de famille de chaque contribuable.
Le contribuable dispose toutefois d’un droit d’option : il peut opter pour un taux neutre ou un taux individualisé (s’il vit en couple).
Taux neutre
Avec l’application du taux du foyer, l’employeur connaît indirectement le niveau de revenus global du foyer fiscal du salarié concerné. Pour préserver la confidentialité sur ses revenus, le salarié peut donc demander à ce que l’administration fiscale ne transmette à l’employeur que le taux de prélèvement lié à son seul salaire. Il devra alors opter pour le taux neutre du prélèvement à la source.
Cette option peut être formulée au moment de la réception de l’avis d’imposition.
Taux individualisé
Le taux applicable est celui du foyer. Les deux membres d’un couple se voient donc appliquer le même taux, calculé à partir de leur déclaration d’impôt commune. Toutefois, l’administration fiscale leur laisse la possibilité d’opter pour un taux individualisé de retenue à la source afin de prendre en compte les différences de revenus entre les deux conjoints.
Dans ce cas, chaque conjoint se voit appliquer un taux différent, correspondant à ses revenus personnels. Cette option ne permet toutefois pas de faire des économies d’impôts : au final, le couple paie le même montant total, seule la répartition du paiement change.
Modifier et ajuster son taux
Le taux de prélèvement à la source n’est pas immuable : il peut être modifié si votre niveau de revenus change.
Mise à jour et actualisation du taux
Le taux de prélèvement est automatiquement mis à jour une fois par an au mois d’août de l’année N, après l’envoi de la déclaration de revenus effectué en mai de l’année N. Le nouveau taux s’applique alors du 1er septembre de l’année N au 31 août de l’année N+1.
Modulation du taux de prélèvement
Dans l’ancien système, les contribuables pouvaient modifier à la hausse ou la baisse le montant de leur prélèvement mensuel ou de leur tiers provisionnel. Dans la même logique, ils peuvent également modifier leur taux de prélèvement à la source en cours d’année.
Aucune condition n’est exigée en cas de variation à la hausse : le contribuable pourra librement augmenter son taux de prélèvement.
En revanche, il ne pourra diminuer son taux de prélèvement à la source que si le montant global de son revenu diminue de 10% (ou 200 euros au moins). Faute de quoi, il encourt une pénalité de 10%.
Exemple fourni par le ministre des Comptes publics, Gérald Darmanin : le propriétaire d’un studio dont le locataire quitte le logement pourra signaler cette baisse de revenus aux impôts par internet. Il ne sera alors plus imposé sur ce revenu pendant les mois où le loyer n’est plus versé.
Mariage, Pacs, naissance et divorce
Certains événements personnels (mariage, Pacs, divorce, naissance…) peuvent modifier de façon notable le montant de l’impôt annuel que vous avez à payer. En cas de changement de situation, vous devez informer l’administration fiscale dans les 60 jours via le site des impôts. Une fois cette démarche accomplie, vous pourrez demander une modification de votre taux de prélèvement à la source. En revanche, aucune démarche n’est nécessaire auprès de l’employeur : le fisc l’informera du nouveau taux applicable, au plus tard le 3e mois suivant la demande.
Réductions d’impôt
La retenue à la source modifie le mécanisme d’imputation des crédits et des réductions d’impôt.
Pour éviter un décalage de trésorerie trop important, les impôts prévoient de verser un acompte de 60 % de leur crédit ou réduction d’impôt en janvier.
Exonération des revenus 2018
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p class=”niv1″ style=”text-align: justify;”>L’instauration du prélèvement à la source implique une année blanche pour éviter que le contribuable supporte la même année deux fois l’impôt. Sans cette année blanche, il payerait en 2019 à la fois le prélèvement à la source sur les revenus de 2019 et l’impôt sur les revenus perçus en 2018. Pour prévenir ce double-paiement, les revenus perçus en 2018 sont exonérés d’impôt. Mais soucieuse d’éviter toute optimisation fiscale, l’administration prévoit de limiter cette exonération aux revenus courants non exceptionnels. Et elle peut vérifier la situation du contribuable au titre de 2018 pendant quatre ans (et non pas trois ans, délai normal de prescription).